amitié, famille, harcèlement
Voilà un récit délibérément déroutant : il y a le narrateur, et puis il y a des personnages qui parlent sous forme de poème en vers libre.
J’ai aimé Luce, au prénom prédestiné, qui veut savoir pourquoi sa soeur est morte dans la rivière l’Eau Rouge de son village Belle-Rose.
J’ai aimé le Maudit, cet homme qui vit en marge du village parce que tout ce qu’il touche se détruit. Sa petite soeur, 20 ans auparavant, est elle aussi décédée dans cette même rivière.
J’ai eu de la peine pour le Maudit qui vit seul. Que les habitants appellent quand ils ont besoin d’aide mais qui le rejettent sitôt après.
J’ai aimé découvrir sa vie petit à petit, son destin tragique.
J’ai aimé la persévérance de Luce : contre ses parents, contre le village.
J’ai aimé que Luce fasse du Maudit son allié dans sa quête de la vérité.
Un roman plein de serpents qui figurent les drames de la vie du Maudit.
J’ai aimé cette danse des oubliés qui lie les mains de ceux qui sont rejetés. Un roman très poétique sur le harcèlement.
L’image que je retiendrai :
Celle de Luce qui, au début du roman, danse à en oublier sa famille.
enquête, famille
Cette lecture m’a permis de découvrir la ville de Chalon-sur-Saône : son carnaval, son fleuve, son club BDSM, son avocat hyper-compétent proche de la retraite.
J’ai aimé Catherine, ancienne flic de la Ferroviaire, qui travaille maintenant pour l’avocat Pierson. Son problème : elle ne ressent plus la douleur physique ce qui l’oblige à faire attention à tout pour ne pas brûler son épiderme.
J’ai aimé la brigade de police qui enquête également sur le décès de la fillette de 12 ans retrouvée morte sous les piles d’un pont.
J’ai aimé que Pierson fasse appel aux mères endeuillées pour rouvrir une ancienne enquête qui présente des similitudes avec le nouveau cas.
J’ai aimé découvrir le carnaval de Chalon qui dure une semaine, présente de nombreux chars et l’élection d’une miss, et se termine par le feu de joie autour des têtes géantes du Roi Cabache et de la Reine Moutelle.
J’ai découvert les gôniots : des personnages déguisés, maquillés ou masqués qui accompagnent les chars lord des défilés.
L’auteure m’a également appris l’existence des colonies de la région qui accueillaient les orphelins parisiens au début du 20e siècle dans des pensionnats afin qu’ils s’installent plus tard et peuplent le département. Bien évidemment, certains pensionnats ont profité du système pour réduire en esclavage des enfants.
Et la théorie des ondes, me direz-vous : de la même façon que le battement d’aile d’un papillon peur provoquer un tsunami, de même le passé de nos aïeux provoquent des drames de nos jours.
Un roman que je n’ai pas lâché du début à la fin avec des personnages attachants et une intrigue prenante.
L’image que je retiendrai :
Celle du nombre de bouteilles de vins qui sont bus au cours du récit, qui se déroule en Bourgogne
espionnage, Syrie
D’après le Times, Le meilleur thriller d’espionnage. Je ne suis pas fan de romans d’espionnage (je m’y perds entre les espions et les contre-espions), mais le côté thriller me tentait, sans oublier le fait que l’action se déroule dans la Syrie de Bachar el-Assad.
Les jeux d’espionnage et de contre-espionnage n’ont pas été trop difficiles pour moi (ouf, j’ai bien tout suivi).
J’ai aimé que l’auteur ne fasse pas la part belle aux américains : eux aussi se fond entourlouper par des espions russes ou syriens.
J’ai aimé le regard du personnage sur Bachar : un grand type dégingandé avec un long cou de girafe. J’ai trouvé la description assez juste.
J’ai détesté sentir l’omniprésence de la peur des syriens qui ne savent jamais quand ni qui va frapper à leur porte à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit.
J’ai adoré le personnage d’Artemis Aphrodite Procter, la cheffe du bureau de Damas, petite femme pleine d’énergie qui n’hésite pas à utiliser un vocabulaire fleuri pour dire ce qu’elle a à dire et faire part de ses émotions.
L’auteur étant un ancien de la CIA, j’ai appris que dans le bâtiment du QG aux Etats-Unis existait le seul distributeur de hot-dog du pays et que l’ambassade américaine de Damas avait été assiégée et avait reçu des fruits et légumes pourries.
Un roman qui montre le fonctionnement du pouvoir syrien : la famille el-Assad vous tient de quelque manière que ce soit ou vous laisse mourir de faim.
L’image que je retiendrai :
Celle de tasses de café qui explosent contre les murs quand les chefs ne sont pas content, aussi bien du côté américain que russe.
Israël
Je découvre l’auteur de polar israélien Yishaï SARID avec ce roman qui date de 2000 (2015 chez Actes Sud).
J’ai aimé suivre le narrateur, avocat sans grande envergure, qui se voit confier le cas d’une jeune fille accusant de viol son supérieur pendant son service militaire.
Aidé de Koby, son adjoint dans cette enquête, ils vont tenter de cerner ce qu’il s’est passé dans ce parc le fameux jour.
J’ai aimé le narrateur, dépassé par l’enquête entre une jeune fille mutique qui souffre de dépression et un jeune soldat prometteur qui prend soin de ses hommes.
J’ai eu de la peine pour lui chaque fois qu’il rentrait chez lui et qu’il retrouvait sa colocataire neurasthénique.
J’ai eu du mal à cerner Niva, la plaignante : est-elle une menteuse ou une jeune fille mal dans sa peau entre un père autoritaire et une mère toujours fourrée chez le rabbin ?
J’ai aimé découvrir Erez, le soldat incriminé, qui est d’un autre temps, celui des conquêtes bibliques.
J’ai adoré découvrir un peu du pays à travers les pages de ce roman, sa population ultra-armée ou très religieuse, sa jeunesse perdue entre deux mondes.
Une lecture qui ouvre sur ce pays toujours en guerre.
L’image que je retiendrai :
Celle du narrateur qui se rend tous les soirs à la plage pour regarder la mer.
Finlande, guerre
Un roman de Norek qui n'est pas un polar ? Et pourquoi pas.
L’auteur nous plonge dans la « guerre d’hiver » qui a vu s’opposer la Finlande à l’URSS du 30 novembre 1939 au 13 mars 1940. L’ogre Staline a voulu annexer ce nouveau petit pays sans y parvenir complètement, ses armées rencontrant une résistance acharnée.
Pensez-donc : ce nouveau pays s’est soudé contre l’envahisseur commun, et les russes ne devaient déclarer que des victoires.
L’auteur suit Simo Häyhä, jeune prodige au tir, entrainé par son père depuis son enfance à ne prélever dans la nature que ce dont il a besoin. Avec ses amis Toivo et Onni, ils partent donc comme tous les hommes au front, celui de Kollaa.
J’ai aimé que l’auteur décrive à la fois ce qu’il se passait du côté Finlandais et du côté russe.
J’ai aimé les rebellions des hommes issus des différents pays qui composaient l’URSS (géorgiens, ukrainiens, moldaves, arméniens, lituaniens et j’en passe), hommes qui devaient passer en premier se faire tuer, les russes passant après.
J’ai découvert les Lotta, les infirmières sur le front.
Et bien sûr, j’ai découvert Simo qui se débat avec sa conscience et sa colère tout au long de ces 105 jours de guerre. J’ai aimé sa modestie et son envie de rester au milieu, un lieu sûr où l’on ne se fait pas voir.
J’ai découvert « L’horreur du Maroc », le capitaine Aarne Juutilainen, littéralement né pour combattre et qui n’hésite pas à monter au combat.
J’ai aimé que ce peuple si brave aie été un des levier de la défaite d’Hitler (qui, suite à la défaite de l’URSS a lancé son offensive contre Staline, allant au casse-pipe).
J’ai donc découvert Simo, surnommé La mort blanche, sniper hors-pair dont les conseils sont encore utilisés de nos jours.
Un roman sur le courage devant l’adversité, sur le combat de David contre Goliath, sur la victoire de l’humain contre la tyrannie.
L’image que je retiendrai :
Celle des soldats russes apprenant à faire du ski pour se déplacer vite comme les finlandais, ce qui fait bien rire ces derniers qui pratique le ski depuis leur plus jeune âge.